Message de Noël
Noël 2006
 
   

Un beau message que l'on m'a envoyé, et que j'ai envie de vous partager:

(Echo du Gros-de-Vaud du 15.12.2006)

Dans le ciel de décembre, le bonjour très tôt devient un bonsoir. A peine le café est-il chaud, les étoiles sont tombées à travers les nuages pour allumer les villes et les villages. Nous sommes devenus gens du Nord attendant la neige, ce tapis effrayant les bergers à bicyclette.

Nous avons tiré de l'armoire le bonnet de laine: les oreilles s'impatientaient. Bonjour! Ça se dit avec une main gantée, ou avec un peu de vapeur qui sort de la bouche. Si les savants de la météorologie ont exagéré, la fin de l'automne sera fidèle à nos souvenirs de nains de jardin enrhumés. Les luges, s'il en reste, s'en iront vers l'hiver, tenues en laisse par les enfants.

Pas loin des platanes, de nouveaux amis exilés d'Afrique ont passé étonnés, noirs sur blanc. Chez eux, il neige du sable couleur blonde, pendant quatre saisons. Nous envions leur été royal; leur soleil qui fête Noël sans fausse barbe, au mois qu'il veut. Eux pensent que nous ignorons la richesse du cadeau qui nous est fait. Le ciel peut changer d'habits et d'humeur, l'espace d'un cri de mouette. Les saisons nous surprennent à chaque détour du calendrier. Il suffit d'une nuit au rêve imprévu, d'une aube qui se lève plus tard que le veut le calendrier et nous allons d'une surprise à l'autre.

Hier il a tonné, la grêle était un fruit ennemi tombé d'un arbre sans pitié. Ce matin, la rivière chante comme si de rien n'était. A l' endroit où la glace figeait la vie dansent de petites algues. Le tambour du cœur battait trop fort; la vie peut être brutale, souvent nous l'avons menée comme ça. Un geste, un regard et la flûte s'éveille. Elle n'attendait que ça. Vous entendez? Sous la carapace d'un bourreau, un ange s'impatientait.

Noël approche. Loin d'ici. il peut porter un autre nom et animer de ses lumières une autre saison. Là-bas, minuit sonne à l'heure où nos femmes vont au bureau ou à la fontaine, ou quand nos écoliers ont jeté leurs cahiers au milieu des bandes dessinées. Leur vent souffle la colère et leur sang crée sur les dalles de sinistres mosaïques. Leurs mages s'arrachent les tripes tandis que les nôtres font la sieste. Les chapitres de la Sainte Histoire ne se ressemblent pas.

La voie de l'arche de Noël ondule sur l'horizon. Elle a décidé de remettre les marins du monde sur le bon cap, mais chacun d'eux croit que c'est l'affaire des autres. Assis sur le mur du port, un enfant a crié au large: «Les uns avec les autres, on ferait un bel équipage !»

Emile Gardaz

(poète challensois)